Il y a longtemps que je n'avais plus écris sur mon blog. Il faut dire que j'ai été très occupé depuis la dernière fois et qu'il m'est arrivé pas mal de choses.
Dans un premier temps, ma relation avec Cécile n'a pas vraiment évolué dans le bon sens, disons.
Depuis le temps que nous avions passé ensemble, je pensais qu'elle savait comment je fonctionnais, ce qu'il fallait faire et ne pas faire avec moi, le schizoïde de seconde zone. J'ai été vraiment surpris. Lors de la fin de ma licence l'année dernière au mois de juin, j'étais sous pression à cause en grande partie de mes examens. Il ne me restait que peu de temps pour étudier convenablement car j'ai du faire face à beaucoup d'angoisse les derniers temps, chose qui m'a véritablement paralysé. La source de ces angoisses était dû en très grande partie à moi même. Je me suis mis une pression inutile sur le dos entre mes dossiers à rendre pour mon entrée en master et le temps qu'il me restait avant l'échéance. Dans ces cas là, il m'arrive fréquemment d'en faire beaucoup trop. Résultat, je me suis retrouvé lessiver, complètement à la masse, impossible de travailler dans de bonnes conditions sans tremblements ni suées. Il a donc fallut que je me remette au travail plutôt que de tout remettre à demain. J'ai augmenté les doses d'anxiolytiques pour arriver à mes fins. En parallèle, Cécile était très avenante, me proposant de faire les tâches ménagères à ma place, elle m'apportait souvent du réconfort quand j'en avais besoin avec un mot gentil, une attention. De son côté, elle avait beaucoup de travail aussi à cause du départ à la retraite d'une collègue. Autrement dit, nous étions tout les deux très occupés. Ainsi, nous n'avions que peu de temps pour nous. A vrai dire, cela ne m'a pas vraiment dérangé. J'étais bien trop focalisé sur mon objectif à la fac pour penser à elle, du moins pour penser à elle comme elle l'aurait voulu. Bien sur, je vivais avec elle alors penser à elle durant la journée, c'était devenu naturel.
"Il est tard, quand va-t-elle rentré ? - Tiens, elle a appelé. Je devrais en faire autant. - Je vais lui demander si elle peut passer à la pharmacie. - Elle sortira tard ce soir, je vais faire à manger quelque chose qu'elle apprécie. - Et si on allait se promener ?"
Penser à ce genre de choses était devenu courant, je le faisais presque sans y réfléchir vraiment. Lorsque j’eus mes résultats et que je pus constater que mes efforts avaient porté leurs fruits, la pression retomba considérablement. J'ai profité du mois qui suivi pour ne rien faire et me consacrer à ce que j'avais envie de faire mais que j'avais du mettre de côté durant un long moment. Lire des livres hors programme, faire de la musique, jouer aux jeux vidéo, regarder la télé, autant de chose très simples mais auquel je ne pouvais pas sacrifier mon temps précieux. Cécile avait pris quinze jours de vacances afin que l'on soit tout les deux. Cependant, il y avait quelque chose que je n'avais pas prévu.
Le climat était bon enfant, l'appartement calme, je me rappelle avoir été bien ce matin là. Cécile vint me voir tout miel, très souriante et s'est assise à côté de moi sur le canapé. Elle m'enlaça et me demanda si j'étais prêt à "passer la vitesse supérieure". J'ai pris ça comme une demande de câlins qui se serait fini dans la chambre mais j'avais tord. Elle m'a demandé si je voulais qu'on se marie. Comme le ton était léger, je pensais qu'elle plaisantait. Pas du tout. Après avoir répondu non une première fois, elle me regarde dans les yeux, et réitère sa demande avec bien plus de sérieux. Cette fois je sais qu'elle ne plaisante pas. Je me souviens avoir arrêté tout ce que je faisais et lui avoir répondu avec fermeté : "Non, bien sur que non". Très déçue, elle m'a d'abord demandé pourquoi. La raison me paraissait évidente. Je n'étais pas prêt et je n'avais aucune envie de me marier avec elle. J'étais bien trop surpris pour réfléchir plus en profondeur. C'était non, tout simplement. Elle est alors partie en pleurant dans la chambre. Que devais-je faire ? Je savais bien que la question n'allait pas être réglée rapidement aussi, un autre problème bien plus grand pointait son nez. Comment le lui faire comprendre.
Je suis allé à sa rencontre. Bien sur, elle pleurait à chaudes larmes. Je me suis assis sur le lit et j'ai essayé de la calmer. Sans succès. Elle ne voulait rien entendre, disant qu'elle avait fait beaucoup d'efforts envers moi pour que je me sente bien et que j'avais une drôle de façon de lui dire merci. C'est plutôt moi qui trouvais sa façon bizarre, on ne remercie pas quelqu'un en se mariant avant lui. Pour moi, le mariage représentait une union sur le long, très long terme. J'avais l'exemple de mes parents en tête. Bien entendu, je ne voulais pas de ça du tout. Notre couple fonctionnait bien depuis quelques temps à dire vrai alors je ne comprenais pas ce revirement de situation, ce qu'elle attendait de moi, ce qu'elle cherchait. En fait, tout devint plus clair. Elle avait fait des efforts et attendait quelque chose en retour de ma part, une récompense en quelque sorte. Mais je lui ai bien dit ce qu'elle savait sûrement déjà, je ne fonctionne pas ainsi. Il était inutile d'attendre autant de ma part surtout de cette manière. Il était impossible de ça fonctionne. Mais elle campait ses positions, inconsolable. Elle m'a demandé si je l'aimais. A ce moment là, il y eu comme une mise en veille de mon cerveau. J'ai répondu que je ne savais pas. Ce fut la seule réponse qui vint à mon esprit embrouillé. Je suis sorti de la chambre et me suis soudain dis : je le lui dis que je l'aime, ne va-t-elle pas se faire plus d'illusions ? Et si je lui dis que je ne l'aime pas en fait, elle risque d'être brisée. Et puis au bout du compte, pour la première fois depuis longtemps, je me suis demandé : et qu'est ce que je veux, moi ?
Ce que je voulais : m'échapper de cette situation au plus vite.
J'ai pris mon courage à deux mains. Je suis entré dans la chambre et je lui ai calmement dis que ce n'était plus possible. Nous ne pouvions plus rester ainsi. Elle se faisait visiblement du mal, attendant des sentiments, des espérances qui ne viendraient probablement jamais et moi, je restais complètement passif de cette situation qu'elle voulait à tout prix que je prenne en main, que je sois un homme qui veille sur elle, la protège comme elle le désirait. Que j'endosse le rôle qui me revenait. Un rôle que je ne pourrais jamais assumer pleinement. Je sentais bien que c'était la bonne décision à prendre pour moi car je me suis sentis tout de suite soulagé. Par contre, pour Cécile se fut la douche froide. Elle est soudainement devenue méchante, passant de la tristesse à la haine en un instant. J'ai été traité de bien des noms sans rien répliquer puis, elle a cherché à me frapper maladroitement. J'ai attrapé ses mains afin qu'elle arrête son manège. En la relâchant, elle m'a fait remarquer que j'y avais laissé des marques rouges et qu'elle allait trouver la police pour lui avoir fait du mal. Bien sur j'avais serré, mais de la à dire que c'était de la maltraitance, elle y allait fort. Je lui ai demandé ce qu'elle voulait. Elle a répondu qu'elle voulait que je ressente ce qu'elle ressentait en ce moment, qu'elle ne me lâcherait pas tant que je n'aurais pas mal, que j'avais gâché sa vie. Je suis sorti de la pièce, j'ai voulu prendre le téléphone pour appeler sa mère mais elle m'a tiré par la chemise, me disant que je devais rester avec elle. Je ne pouvais pas lui parler, elle ne cessait de crier sans vouloir se calmer. Au moment où elle tenta de m'arracher le téléphone des mains, j'ai crié moi aussi. Un "ça suffit" très sonore en lui montrant le revers de ma main comme si je m’apprêtais à la gifler. A peine mon geste avait il commencé que je l'avais arrêté, regrettant immédiatement. Elle a eu peur, s'est protégé le visage et s'est finalement assise au sol, stoppant tout cris. Je me suis fais peur moi même, me demandant ce qui m'était arrivé. J'ai profité de ce temps mort pour téléphoner à sa mère qui est venue la récupérer un peu plus tard.
Je n'ai pu rester toute la nuit dans l'appartement alors je suis rentré chez mes parents. J'y suis resté tout cet été. Cécile m'appelait tout les jours. Je n'ai répondu qu'une fois, le lendemain de notre dispute pour m'excuser. Elle n'avait pas l'air de m'en tenir rigueur et voulait plus que tout que l'on recommence comme avant. Ce n'était pas envisageable pour moi. Je lui ai expliqué longuement qu'il fallait mieux en arrêter là avant de se faire plus de mal. Je parlais dans le vide. Bien plus tard j'ai rencontré sa mère. Elle avait bien compris mon discours et ne cherchait pas à revenir la dessus, elle m'a plutôt parlé de sa fille. Cécile était très déprimée, elle ne voulait plus travailler. Cela devenait problématique alors elle s'est mise en maladie. Sa mère a demandé à son psychiatre qu'elle soit mise en observation pour au moins un jour car elle se faisait du mal, dormait et mangeait peu, n'avait plus le goût à rien. Elle est restée à l'hôpital une semaine. Plus qu'une peine de cœur, elle sombrait dans la dépression. Je recevais de nombreux sms et mail tout aussi incohérents les uns que les autres. Un jour, elle disait m'aimer énormément. Le lendemain j'étais le responsable de son malheur. Elle disais que j'étais l'amour de sa vie, puis me comparait à son père, ne m'écrivait qu'un seul mot parfois.
J'ai su avant de reprendre les cours que l'appartement avait été reloué. Cécile habitait chez sa mère et n'a repris le travail qu'au mois de novembre ou de décembre, je ne m'en souviens plus. Ses derniers messages datent du mois de janvier. A ma demande, sa mère me téléphonait tout les mois. J'avais peur qu'elle se suicide mais apparemment, elle n'avait rien eu de tout cela en tête. Le dernier appel au mois de mars me disait qu'elle était partie avec des amies en Espagne. J'ai demandé à ce qu'elle n'appelle plus. Pomponette est allée habiter chez sa maîtresse.
En relativisant, je me suis bien rendu compte que j'avais une part de responsabilité dans ce qui lui était arrivé. Je n'ai pas du être très diplomate mais j'avais peur, si peur d'être prisonnier d'elle, de "nous", que je me suis lâchement enfuit. Je n'ai pas vraiment eu de remords car d'un côté, je me suis dis que j'avais échappé à une situation qui m'aurait tout ou tard dépassé. Alors oui, j'ai été triste. Je m'étais investis avec elle, avec nous. J'ai passé de très bons moments. Pas une larme n'a coulé de mes yeux. Pourtant intérieurement, je me sentais mal. J'avais cette impression douloureuse d'avoir raté, manqué quelque chose. J'aurais pu avoir une vie normale, rentrer un peu plus dans le moule que la société fabrique pour nous tous, un moule dans lequel on se doit d'entrer quitte à ce qu'il ne soit pas de notre taille car c'est ainsi que fonctionne "la norme". Mais au font, qu'est ce que la norme ? Est il normal de vouloir être à l'image de tous au prix de notre propre bonheur ? Lorsque je me suis mis en couple avec Cécile, je pensais être un peu plus vivant aux yeux de la société, d'en faire pleinement partie. Je n'avais plus l'impression d'être une personne schizoïde, d'être vu comme un pariât de la société qui devait forcément être à part et traité avec des conventions spéciales. Cette expérience m'a indéniablement changé. Je n'ai jamais voulu le malheur de qui que ce soit et certainement pas d'elle. Je la remercie pour cela.
Aujourd'hui, je vis et vois mon monde sous un angle nouveau.